Dans la mélancolie, le sujet fait l’épreuve d’une désillusion fondamentale, marquée par une brisure des investissements, qui signe une ruine de l’imaginaire. Cette faille du champ de l’illusion implique une altération du rapport à l’idéal et la position du sujet est dominée par l’incroyance. À travers cet article, les auteurs interrogent la manière dont la création peut susciter un illusionnement du rapport au réel en captant le sujet du côté d’une position nostalgique.

À partir d’un référentiel psychanalytique, les auteurs proposent tout d’abord d’analyser la dynamique subjectivante de l’illusion en tant qu’elle soutient la fiction singulière et assure une fonction de traitement de la détresse originaire. La nostalgie est ainsi pensée comme porteuse d’illusions et est considérée dans son statut métapsychologique comme une matérialisation imaginaire de l’objet perdu. Les auteurs proposent certains questionnements concernant la manière dont la création capterait le sujet dans un rapport nostalgique à l’objet perdu, ce qui permettrait ainsi un illusionnement du rapport au réel. Un récit de cas clinique est également présenté afin d’approfondir les élaborations que propose cet article.

Émergeant en bordure du vide, la répétition d’un acte de création semble ouvrir le sujet à un espace d’illusions au sein duquel il peut faire résonner les traces qu’a laissé l’objet dans sa perte. Le travail de la création aménage le vide inscrit au cœur de l’être parlant et inspire le regret nostalgique qui vise à traiter la perte de manière poétique. La création prête une voix pour dire l’irréversible de la perte qui anime le sujet, et donne corps au cri resté en suspens dans la mélancolie. Le processus de création semble donc pris dans un mouvement d’embaumement nostalgique, qui exhume les restes de l’objet perdu et en commémore la perte.

Bien que la position nostalgique puisse être pensée comme matérialisation fantasmatique de l’objet et provoque une fixation libidinale du sujet à un objet-leurre, ce qui éclipse ainsi tout investissement externe, l’abord de la nostalgie semble également le préserver d’un anéantissement mélancolique du désir.

En arborant une position nostalgique par le biais d’un acte de création, l’indicible du remords mélancolique cède la place à l’ineffable du regret nostalgique.

In melancholy, the subject experiences a fundamental disillusionment, marked by a breakdown of investments, which signals a ruin of the imagination. This flaw in the field of illusion implies an alteration of the relationship to the ideal, and the position of the subject is dominated by disbelief. Through this article, the authors question the way in which creation can create an illusion of the relationship with reality by capturing the subject from a nostalgic position.

From a psychoanalytic reference, the authors first propose to analyze the subjectivizing dynamic of the illusion insofar as it supports the singular fiction and ensures a function of treating the original distress. Nostalgia is thus thought of as carrying illusions and is considered in its metapsychological status as an imaginary materialization of the lost object. The authors propose certain questions concerning the way in which the creation would capture the subject in a nostalgic relationship with the lost object, which would thus allow an illusion of the relationship with reality. A clinical case report is also presented in order to deepen the elaborations proposed in this article.

Emerging on the edge of the void, the repetition of an act of creation seems to open the subject to a space of illusions within which the traces left by the object in its loss can resonate in the subject. The work of creation fills the void in the heart of the speaking being and inspires nostalgic regret that aspires to treat loss in a poetic way. The creation lends a voice to express the irreversible loss that animates the subject, and gives substance to the cry left suspended in melancholy. The creative process therefore seems caught up in a movement of nostalgic embalming, which exhumes the remains of the lost object and commemorates its loss.

Although the nostalgic position can be thought of as a fantasmatic materialization of the object and can provoke a libidinal fixation of the subject to a lure object, which thus eclipses any external investment, the approach to nostalgia also seems to protect it from melancholic annihilation of desire.

By displaying a nostalgic position through an act of creation, inexpressible melancholic remorse gives way to ineffable nostalgic regret.